CHAPITRE 3
Il regarda autour de lui. Il se trouvait seul dans un long couloir peu éclairé. Ses yeux se projetaient rapidement de droite à gauche dans l'espoir d'apercevoir la source du son, ses doigts se tortillant d'anxiété.
" Psssst, par ici." Fit la voix.
Le garçon à lunettes qu'il avait vu précédemment se tenait dans l'entre-bâillement d'une porte. Il semblait vouloir attirer son attention.
" Viens par ici ! " Chuchota t-il en joignant le geste à la parole.
Surpris, Bruno s'exécuta et se trouva nez à nez avec un jeune homme brun aux yeux marrons de petite corpulence. Son âge devait avoisiner la quinzaine d'années.
" Tu es à la recherche de tu-sais-quoi ? dit le garçon.
- Omn...? " commença Bruno.
- Chuuuuut, personne ne doit prononcer ce nom !! s'exclama t-il les paumes des mains tournées vers le bas comme pour atténuer les sons qu'il prononçait.
- Ah bon, pourquoi ?
- Je m'appelle Marc-Antoine, fit l'autre pour toute réponse.
- Marc ?
- Marc-Antoine.
- Moi, c'est Bruno.
- Bruno signifie brun en italien et tu es plutôt châtain, remarqua Marc-Antoine.
- Quoi ? interrompit Bruno agacé. Mais, qu'est-ce que tu veux ?
- Je cherche la même chose que toi. Tu es plutôt robuste tu ferais un bon partenaire d'aventures. Je serai le cerveau et toi les muscles, OK ? " Le garçon ne cessait de remonter nerveusement ses lunettes en parlant.
Bruno voulait s'indigner et expliquer qu'il valait plus que de simples muscles mais l'autre ne lui en laissa pas le temps.
"J'ai déjà trouvé un indice, dit-il tout fier. Mon cerveau génial ne tardera pas à trouver la suite. J'ai 160 de QI. " Ajouta-t-il comme pour s'expliquer.
Bruno savait que c'était l'équivalent du quotient intellectuel d'Einstein mais ne fut pas impressionné par la vantardise du garçon.
" C'est quoi ton indice ? " demanda-t-il, soudain intéressé.
- Suis-moi dans ma chambre, je vais t'expliquer."
Intrigué par le personnage qui, malgré un ego sur-dimensionné, lui paraissait inoffensif, Bruno lui emboita le pas. Il entrèrent dans une chambre tout ce qu'il y a de plus banal. Le plancher grinçait par endroits et un mélange de poussière et de moisissures chatouillait le nez. On y remarquait un lit double, une commode et une vieille affiche délavée par le temps. A défaut de mieux, tous les deux, fatigués par les efforts de la journée, se laissèrent tomber sur le lit, plus confortable qu'il n'y paraissait. Après quelques instants Marc-Antoine prit la parole :
" Tu vois cette affiche ?
- L'affiche de cinéma qui date de Mathusalem ?
- Lis ce qui est écrit ? "
Bruno plissa les yeux afin de mieux lire les caractères abîmés par les années.
" From Here to Eternity with Montgomery Cliff, déchiffra-t-il.
- J'ai remarqué ces posters dans toute l'auberge, continua Marc-Antoine, ce sont tous des films avec le même acteur. Il y a Red River, A place in the Sun etc...
- L'aubergiste est peut-être un fan.
- C'est possible, mais il y a un hic.
- Elles sont anciennes, tenta Bruno.
- Normal, l'acteur est décédé dans les années 60. Relis sont nom de famille.
- Hum, Cliff.
- Et bien son vrai nom est Clift, pas Cliff qui signifie falaise en anglais, et la falaise du Mont Gommerie n'est qu'à quelques kilomètres d'ici.
- Noooooooon ! s'exclama Bruno, visiblement aussi surpris qu'impressionné. Il commençait à penser que son compagnon était vraiment pourvu d'un cerveau génial.
- Maintenant il ne nous reste plus qu'à trouver le point d'entrée exact.
- Et comment penses tu faire ça exactement ?
- Pas compliqué, continua Marc-Antoine. Il suffit de continuer à fureter et récolter de nouveaux indices."
La soirée tirant à sa fin et les investigations nocturnes s'avérant difficiles, les deux compagnons décidèrent de partager la chambre pour la nuit et de reprendre leurs recherches dès le lendemain matin.
* * *
Ce n'est qu'après un solide petit déjeuner pris au restaurant de l'auberge que les deux garçons reprirent leurs investigations. Il s'agissait d'un buffet servi dans une salle modeste donnant sur un petit jardin intérieur fleuri. Bruno fit remarquer que, vu les fonds qui lui restaient, il ne faudrait pas trop s'attarder dans la région.
" Bah, ne t'inquiète pas pour ça j'ai fait le plein avant de partir. Mes parents sont médecin et avocat, fit remarquer Marc-Antoine d'humeur généreuse. Et puis, là où nous allons, il n'y a pas besoin d'argent. "
Bruno apprécia le geste tout en se promettant de ne pas toucher à un centime du pécule du jeune homme.
Il avait été élevé par des parents modestes (sa mère enseignait à l'école de son quartier et son père travaillait dans un garage) qui lui avaient inculqué la responsabilité personnelle et le respect d'autrui.
" Merci, dit-il, mais ça devrait suffire pour encore quelques jours.
- Ça ne sera peut-être pas si long, regarde dehors, tu ne trouves pas étrange qu'il y ait une pierre tombale en plein milieu du jardin ? “